SaintExpress 2021

Aujourd’hui je vous emmène sur la SaintéLyon, un classique du trail français qui se déroule chaque année fin novembre, début décembre pour s’assurer d’avoir une météo toujours challengeante. Pour la première fois, je retourne sur une course que j’ai déjà faite : La SaintExpress, 46 km pour 1100 m de dénivelé positif. C’est également la première fois que je m’inscris sur un trail dans le but de faire un chrono. Jusqu’à présent mon seul but sur les trails était de finir. Mon classement sur l’UT4M challenge et mon chrono sur le marathon de Tours, m’ont fait dire que je pouvais probablement commencer à viser des top X. Du coup, aujourd’hui objectif annoncé entre 4h et 4h30 pour viser un top 100, mais au fond de ma tête il y a un petit top 50 qui clignote.

Côté préparation, en course à pied je n’ai pas changé grand-chose si ce n’est que depuis septembre je suis inscrit dans un club de triathlon. J’ai décidé de garder ma priorité sur la course à pied jusqu’au printemps, du coup je nage un peu et je pédale à l’occasion mais la plupart du volume sur faire toujours en baskets. Là où ça a un peu changé c’est que je fais mon entraînement intensif avec le club et il n’y a pas à dire, avoir des personnes autours de soi sur ce genre d’entraînement pousse à aller plus vite et faire de meilleur séance niveau intensité. Rien de neuf non plus, si ce n’est que je me suis décidé un peu tard à racheter une paire de chaussures de trail, les anciennes ayant perdu leur âme sur le GR20. Bien que j’ai pris le même modèle pour garder une continuité, il aurait été plus malin de faire plus de 5 km avant la course, histoire qu’elles se forment et que j’évite les méchantes ampoules.

L’aventure de la SaintExpress commence Gare de Lyon à Paris. A mon arrivée en gare, on m’indique la sortie au motif que la gare est évacuée en raison d’un colis suspect. Sage et discipliné, je sors j’attends avec bien 2000 personnes devant. Comme on est la veille de la course, j’ai un niveau -10 de stress quant au fait de rater mon train. J’attends gentiment les infos, en me disant qu’ils vont devoir retarder tous les trains. Après 30 min sans info, on aperçoit un employé de la SNCF essayer de communiquer avec son mégaphone très largement sous dimensionné. On n’entend rien et les gens se répètent les bribes d’info, qu’ils repassent à leur voisin etc. Quand je demande à ma voisine ce qu’elle a compris elle me dit « Perrache » . En même temps, des gens bougent. Éclaires dans mon cerveau. Ils ont dû rouvrir l’autre hall et demandent aux voyageurs pour Lyon Perrache de s’y rendre. Quand j’arrive devant ma voie, on est une trentaine à être bloqué et se voir refuser l’accès au train au motif que « l’embarquement s’arrête 2 minutes avant le départ ». Quelques personnes plus stressées et grognonnes que moi font remarquer au contrôleur que ça ressemble à du foutage de gueule de nous bloquer en dehors de la gare, pour finir par nous dire que l’on est en retard. Il appelle son boss à la radio, qui lui répond probablement que oui c’est du foutage de gueule et qu’il est préférable de laisser monter cette horde de clients un peu agacés. Cool c’est chouette, je suis dans le train, je vais voir mes copains… ou pas.

Murphy qui devait s’ennuyer ce jour-là a décidé qu’une personne allait essayer d’arrêter le TGV précédent avec son corps. Évidemment on l’apprend tard, quand on est bien engagé sur la ligne grande vitesse. Le temps qu’un conseil de guerre se mette en place entre les différents services de la SNCF, on attend tranquillement en pleine voie. La contrôleuse finit par nous annoncer que l’on fait demi-tour jusqu’à un embranchement, mais on ne sait pas où. On finit par arriver à Dijon, autant dire que l’on a bien remonté. On repart direction Lyon, via les voies TER = ça n’avance pas. Un petit arrêt en gare car le conducteur doit récupérer des documents sans lesquels il ne sera pas en mesure d’ouvrir les portes du TGV, WTF ?! A ce stade on a déjà 3h de retard, alors que le conducteur récupère des documents ou fasse une pause clope, ça ne change plus grand-chose pour moi. Et on re-re-repart pour se re-re-re-re-arrêter à Chalon, puis à Macon pour régulation du trafic. Bilan 5h de retard, je suis affamé. Seul point positif, je viens d’améliorer un PR (personnal record). Mon précédent retard le plus long était de 4h, je mets donc une bonne heure à mon record ce qui fait toujours plaisir.

La journée de samedi se passe tranquillement entre jeux de société et récupération de dossard. Être occupé à jouer toute la journée ne donne pas trop le temps de stresser pour la course. Une petite heure avant la course, je contacte Antoine, un coureur de Tours que je n’ai jamais rencontré, car on a eu la bonne idée d’être malade en alternance à chaque fois que l’on devait courir ensemble. On se met d’accord pour se rejoindre au niveau des bus qui vont nous amener au départ. On arrive à se retrouver et à monter dans un des premiers bus. On discute tranquillement pendant 1h30, le temps d’arriver à St Catherine. Sur place on constate qu’il y a de la neige. En même temps, ça fait une semaine que les différentes météos varient entre 8 cm de neige et de la pluie. Je vérifie une dernière fois ce qu’annonce la météo et je me change en conséquence avant de sortir du bus.

L’arrivée sur la route est assez rock & roll. En effet, j’avais bien anticipé le concept de neige, moins celui de verglas. Comme nous sommes un peu moins de 3000 coureurs à tous venir en bus, ceux-ci ont dû nous déposer un peu loin du départ. On part donc pour un bon kilomètre à respirer du pot d’échappement de bus tout en évitant de faire un triple axel par mégarde.

Quand on voit enfin la ligne de départ, je deviens un peu grognon. Il y est censé avoir des SAS pour que les personnes qui courent plus vite partent dans les premières vagues afin d’éviter la gêne. Comme aucun contrôle n’est fait, les gens faisant partie des SAS tardifs viennent dans ce premier SAS car ils n’ont pas très envie d’attendre dans le froid et de se transformer en glaçon. On fait donc un départ en masse bien bordélique, le tout sur route verglacée. Afin de ne pas être bloqué dans les chemins à venir j’applique la première partie de la stratégie de Lucas Dufour « A fond au départ », on verra si je suis capable de faire la seconde partie de sa stratégie qui est « et après on accélère ».L’air est bien froid. Je respire à travers mon buff et après 10 min de courses je me rends compte que j’inspire et j’expire sur l’aire de « savez-vous planter les choux ». L’explication : aucune. Mon cerveau c’est un jukebox en mode aléatoire en permanence. Ça peut surprendre au début, mais généralement après une soirée passée avec moi les gens s’habituent au grand écart musical.

Comme prévu, il se met à neiger correctement. Ça rend le paysage vraiment féérique, ce qui n’est pas l’adjectif que l’on donne normalement au tracé de la SaintéLyon qui est un peu ennuyeux. En échange de tant de beauté, la neige décide de complexifier un peu le travail en recouvrant les cailloux dans les descentes et en réduisant drastiquement la visibilité en mode écran de veille Windows 95. On s’engage donc dans les descentes à fond sans trop savoir ce que l’on a sous les pieds. La meilleure technique reste de suivre un autre coureur à 2m et de regarder où il met les pieds. Je passe donc mes descentes à passer d’un coureur à l’autre en évitant un maximum d’être devant. Fin des descentes, j’ai toujours mes 2 chevilles, parfait !Comme je l’écrivais juste avant, c’est la première fois que je vise un temps en trail. Ce qui signifie, que je gagne du temps partout où je peux, notamment aux ravitaillements. Là où je passe habituellement plusieurs minutes, j’ai passé entre 10 et 30 secondes maximum par ravitaillement. Remplissage de flasque, un bout de banane et ça repart. Quand je compare avec mes courses précédentes, j’ai l’impression d’avoir des arrêts stands digne de formule 1 sur cette SaintExpress.

J’arrive à Soucieu-en-Jarest, plutôt en forme. J’ai encore mes 2 genoux, ce qui est une nette amélioration par rapport à ma participation de 2018 où j’avais dû faire les 20 derniers km en troti-marchant. Je continue jusqu’à Chaponost, sur une partie du parcours, vraiment pas excitante. Beaucoup, beaucoup de route. Dans ma stratégie de course j’avais prévu remettre un coup d’accélérateur sur les 10 derniers km. Dans ce contexte, il est un peu trop tôt pour rallumer les gaz. Je passe le ravitaillement de Chaponost vitesse grand V. Cependant, je n’arrive pas à mettre le coup d’accélérateur prévu. Niveau cardio et énergie je suis bien, mais les jambes sont lourdes et ne veulent pas accélérer. Je sais que je suis dans le top 100 et que le 4h00 est jouable, je me dis que l’on ne va pas faire le forcing et qu’on accélérera à 5 km de la fin.On continue à passer de chemins en quartier résidentielle. A faire de jolies descentes raides sur le bitume pour bien casser toutes les fibres musculaires. Puis vient un virage et une énième descente. Mon regard se pose trop loin dans la descente. Je rate un trou. Mon pied heurte le sol. J’effectue une jolie roulade sur l’épaule avec réception sur les genoux. Tout est un peu comme dans un film au niveau de l’esthétique, sauf qu’au passage le genou et la hanche ont pris cher, sans parler de mes gants qui ont sauvé ma main. Une coureuse me dépasse, check que tout va bien puis reprend son rythme.

J’ai un peu de mal à convaincre mon corps que c’est encore une bonne idée de courir. Toutefois avec une série d’arguments massifs à base de : il est 2h30 du matin il n’y a plus de transport en commun et le moyen le plus rapide de rentrer à la maison c’est de courir, je finis par le convaincre de se remettre en route. Il me faut un bon kilomètre pour arriver à faire passer la chute dans mon esprit.

Un coureur me reprend, j’en reprends deux. Je vois toujours la frontale de cette coureuse qui m’a doublé lors de la chute. J’essaie de me fixer comme objectif de la rattraper avec l’arrivée, mais je n’arrive pas à faire ma relance à 5 km de l’arrivée, ni même à 2 ou juste sur le dernier. Je passe la ligne d’arrivée en 4h01, très satisfait de la performance. A une minute des 4h alors que l’on a commencé sous la neige, je trouve ça respectable. Je rentre à la maison, à 400m de l’arrivée (merci Romain Pernel😊). J’y retrouve Mimiraptor Fuentes qui a fait la Saintétic et Liudfid Invaders qui a fait la SaintéSprint. On a tous réussi nos objectifs, on part se coucher. Un coup d’œil au classement 53ème. Au réveil, je regarde de nouveau les news de la course et j’ai avancé à la 51ème place. J’étais donc à 1 chute de faire le top 50 que j’avais secrètement espéré. Ce n’est que partie remise.

Lendemain matin, peu de courbatures, surtout en comparaison avec le marathon de Tours qui m’avait rendu incapable de descendre des escaliers pendant 3 jours. Le reste de la récupération se fait à base de jeux et de vin, en bref une bonne aprèm.

Comme toutes les bonnes histoires finissent par une histoire de train, en voici une. J’ai tellement l’habitude de prendre le train pour aller au boulot à Paris, que je suis monté dans le mauvais train. Moi qui avais pris le temps d’effectuer des recherches pour trouver le train direct pour Tours, j’ai gagné un passage par Paris avec correspondance et tout le tintouin.

Allez, à 2022 ! Ça va commencer fort avec 80 km de nuit dans Paris début janvier. Il y aura probablement 2-3 trucs à raconter aussi.