Infinity Trail Pont du Gard 2025
Allez c’est reparti pour un Infinity Trail. Pour ceux qui n’auraient pas suivi les saisons précédentes, c’est : https://laviedeplato.fr/?p=254
On continue à voyager, après la Normandie et le Nord direction l’Occitanie et le soleil, sic. Cette année on va faire des tours autour du Pont du Gard. Comme l’année dernière, je suis arrivé à motiver le compère Louison à m’accompagner. J’avais même persuadé Clémence de s’inscrire, mais un bobo pénible depuis plusieurs mois l’a empêchée de prendre le départ.
De mon côté, la course a plus d’importance pour moi que l’année dernière. Lorsque je planifie une saison, je divise les objectifs en A, B, C.
A = objectif majeur de l’année. Entraînement approprié, temps de récupération pré et post course important et moins de bières les semaines avant d’attaquer l’objectif
B = objectif important. Le but c’est de faire une bonne prestation, sans non plus trop compromettre les entraînements pour les objectifs majeurs de l’année
C = il y a de la lumière, tu gagnes un dossard, les copains y vont, mais rien que ne justifie de ne pas boire de bière (Peter si tu me lis )
L’année dernière la course des Terrils était dans la catégorie B, elle était là pour me préparer à la XGTV qui était là pour me préparer à la SwissPeak, l’objectif A+ de l’année. Cette année la course du Pont du Gard était elle dans la catégorie A, très tôt dans la saison elle ne va pas avoir d’impact majeur sur mon second objectif A prévu fin août. J’allais aussi sur la course avec une mentalité différente des 2 autres Infinity trail pour lesquelles j’avais un objectif précis en tête : respectivement 24 et 30 boucles après quoi je me suis arrêté. Cette fois, l’objectif était d’attendre que la course m’élimine et si c’était assez tard pour la gagner c’était tout aussi bien.
Dans les autres choses qui ne changent pas : l’équipe de choc composée de mes parents et Mathilde. En plus d’être un soutien moral, les premiers apportent une super aide logistique d’avant la course à après la course, du genre ramener des gnocchis chauds à 8h du mat ou transporter mes 20 kgs de matos. Ma maman étant ancienne infirmière, c’est toujours un bonus quand il faut poser un strap ou autre. On n’est pas toujours d’accord sur comment on gère une entorse, mais c’est toujours bien d’avoir une vision médicale, surtout quand la lucidité n’est pas à 100%.
La seconde est tellement multitâches que c’est compliqué d’expliquer à quel point elle est clef dans mes courses, mais l’idée générale c’est que sur place elle s’assure que la checklist soit respectée à chaque ravitaillement / boucles : mettre de la Nok, manger, changer les chaussures, préparer les vêtements de nuit, charger la montre, le MP3, bref une liste de trucs que je finis par oublier au fur et à mesure que mon cerveau fond pendant la course, sans oublier le bisou de relance.
En plus de l’équipe de choc j’avais des supporters : Félix et Laurence, de la famille vivant dans le secteur, ainsi que Romain, Mimi et Sid qui sont toujours dans les bons coups, les 2 derniers ayant étaient là à l’arrivée de la XTGV et la SwissPeak.
Après cette brève introduction, il est temps de rentrer dans la course elle-même. Ah non, encore 1h à attendre, le départ a été décalé suite à un retard sur le check-in des coureurs. Alors on mange un peu, on s’allonge pour se reposer et on prend notre mal en patience. Une heure de retard quand tu as prévu courir plus de 30h c’est à peine plus de 3% alors chill et relax. Le seul truc pénible c’est que compter les boucles depuis midi c’est plus facile que depuis 13h, mais on devrait s’en sortir et au pire ça nous occupera un peu pendant les boucles si on s’ennuie.
Deux cents coureurs au départ. J’invite Louison à se mettre à l’avant afin que l’on puisse démarrer en tête de peloton pour pouvoir faire notre reconnaissance de la boucle tranquillement sans être pris dans les bouchons. On est à quelques minutes du départ, 2-3 officiels et sponsors font leur petit speech, puis c’est au tour de Laz le génial inventeur de ce format de course et de la Barkley de prendre le micro. Il nous donne des conseils sur la stratégie optimale pour battre le record du monde placé au-delà de 100 boucles, à savoir faire une boucle, puis une autre, jusqu’à ne plus en pouvoir… Décompte final 10, 9 … 2, 1 go !!!!!!!!!!!
Dès les 100 premiers mètres se pose la question de la trajectoire à prendre : à gauche la rampe PMR plus confortable à descendre mais qui fait un effet entonnoir ou à droite une volée de 4 marches. Ma préférence va être à la volée de 4 marches jusqu’à ce que l’on ne soit plus qu’une dizaine de coureurs sur la course. Je crois que le thème trajectoire a vraiment été le thème principal pour moi sur cette course. Il est possible que j’hyper intellectualise un peu le truc, mais c’est aussi une façon pour moi de ne pas voir le temps passer. Le but du jeu est d’optimiser chaque passage de la course pour gagner des secondes, limiter les chutes, soulager tel ou tel muscle. J’ai dû mettre quasiment 24h pour trouver ce que je pensais être la formule “parfaite” puis la pluie est tombée et il a fallu revoir certaines trajectoires, les appuis n’étant plus les mêmes. Bref, si vous avez de la place mercredi soir, je suis dispo pour dîner.
Sur cette course, en plus de jouer aux équilibristes sur la trajectoire, il fallait aussi avoir un œil sur le chrono. Contrairement aux Terrils, ici, le parcours est plus étriqué : pas toujours possible de choisir entre marcher ou courir, et se poser tranquillou sur certains singles, c’est juste signer pour un embouteillage façon périph un vendredi soir. Le meilleur exemple ? Le coup de cul au niveau de l’aqueduc. Premier tour, on passe crème. Deuxième tour, on tente la stratégie « immersion dans la masse »… Erreur fatale. Résultat : bloqué·es plus longtemps qu’un téléchargement de mise à jour avec une mauvaise connexion. Du coup, on a ajusté notre technique : accélérer en début de boucle pour devancer le peloton et éviter les bouchons. Ça marche… un peu trop bien même, puisqu’on boucle finalement nos tours en 48 minutes au lieu des 52 prévues.
Pendant ce temps là, radio Louison fonctionne très bien même si Louison se plaint de s’être vu trop récemment et de ne plus avoir assez de sujet de discussions. Vers le milieu de la nuit les programmes s’arrêtent subitement. J’essaie de remplacer l’animateur principal de la station, mais je n’ai pas l’énergie de faire de la radio libre à cette heure de la nuit. On fait donc encore quelques boucles ensembles avec des échanges brefs, avant que Louison ne décide d’aller se coucher. A savoir que le niveau de motivation de Louison pour la course était assez faible, il est arrivé à faire 90 bornes ça laisse songeur sur ce qu’il fera le jour où il aura le mojo.
Pendant que certains se donnent du mal sur la course d’autres jouent à la roue de la fortune. De cette façon Mathilde gagne : une nuit d’hôtel, un ticket pour une salle de jeu et surtout un dossard pour l’année prochaine. Son premier réflexe a été de trouver quelqu’un qui n’est pas moi pour le donner. Ses buts avoués : ne pas avoir à courir elle même, ne pas avoir à faire mon assistance toute la nuit. Heureusement on a plein de copains rigolos et Mimi et Romain ont rapidement essayé de la soudoyer pour obtenir ce fameux graal. A noter que me voir courir en rond comme ça a remotivé Romain à la course à pied, à peine rentré le lendemain il est parti faire un tour. Objectif Marathon sur l’Infinity Trail l’année prochaine !
Niveau physique, dès la 3ème boucle je commence à avoir mal aux jambes mais je connais le phénomène pour l’avoir déjà vécu sur d’autres courses. Contrairement à ce qui à l’air de se passer pour beaucoup de coureurs mon état reste stable, c’est à dire qu’entre la boucle 3 et 30, j’ai eu le même niveau de douleur musculaire en courant. Ca doit être un truc où le corps essaie de te dire tôt que c’est une connerie de partir faire 200 bornes et qu’une fois qu’il réalise que tu vas quand même le faire il décide de couper les signaux d’alarme pour que ça arrête de sonner dans le cockpit.
Si côté musculaire ça a tenu toute la course, les soucis sont arrivés du côté tendineux. A la boucle 27, je sens une gène au niveau du releveur, le tendon qui sert à … relever le pied. C’est un classique en ultra, quand on marche beaucoup ce tendon est sursollicité. Je demande donc à Mathilde de s’improviser kiné, par l’intermédiaire de Youtube en trouvant comment faire un strap pour soulager le releveur. Arrivé à la fin de la boucle ma mère met en place le strap et dès la boucle suivante j’arrive de nouveau à courir et marcher “normalement”. Enfin c’est ce que je crois car 2-3 boucles plus tard c’est une douleur au talon d’Achille qui arrive sur le même pied. Il semblerait que le changement de foulée induit par la douleur aux releveurs, puis le strap aient déplacé les contraires sur l’arrière du pied. Je passe 2-3 boucles à tester des trucs : courir plus vite, moins vite, marcher différemment, mais rien n’y fait. La douleur n’est pas horrible mais elle est gentiment passée de 1 à 2, puis de 2 à 3, puis de 3 à 4 boucle après boucle. Les Backyard ont ça d’intraitable que tu ne peux pas décider de t’arrêter 3h pour faire une massage, dormir ou autre, tu as juste une poignée de minutes par tour que tu dois optimiser pour être capable de repartir encore et encore.
Sur la boucle 32 mon cerveau boucle à l’infini. J’ai bien ma liste de “pourquoi je cours” pour essayer de contrer toutes les envies d’abandon mais ça ne suffit pas. En parallèle, je n’arrive pas à trouver une musique qui me plaise. Je suis normalement capable de réguler mes émotions en adaptant la musique, j’ai un registre TRES (trop) large allant du rap assez sale, à la variété française en passant par des cœurs religieux, mais là rien ne parle je sais que c’est mauvais signe. Je décide de tenter l’appel à un ami en la personne de Lucas. Il se veut positif et me donne des raisons de continuer mais je n’ai pas l’électrochoc espéré. Je prends la décision de finir en marchant, de profiter de cette dernière boucle, de savourer le chemin parcouru et d’être bienveillant avec moi.
Petite histoire rigolote, à la fin de la boucle je me rends compte que j’ai perdu un gant sur ce dernier tour mais je n’ai pas du tout l’intention de faire un tour de plus pour un gant. Alors au moment d’aller encourager les 4 coureurs toujours en lice, je leur dis que s’ils retrouvent un gant, ils peuvent le ramasser, que c’est le mien et que je serais content de le retrouver. L’un des coureurs m’indique qu’il sait exactement où se trouve mon gant, mais qu’il ne pourra pas me le récupérer car il n’est plus en mesure de toucher le sol
N’étant pas répartie sur cette boucle je passe par le protocole : retirer ma photo du tableau des coureurs encore en course, recevoir les cadeaux de non finisseur, faire une mini interview avec Morgane la community manageuse. A la fin de tout ça je cherche Laz pour aller faire la photo qui va bien dans l’album de famille. Morgane m’indique que Laz aime bien dédicacer les médailles, je le trouve et lui demande de le faire. Comme on s’y attend du personnage, sa signature s’accompagne d’une phrase pour troller le non finisseur que je suis. Je repars ensuite au stand pour me retaper pendant que Mathilde attaque le rangement de ma chambre d’ado, dixit Benjamin. Laz vient dans la pièce et semble content de pouvoir discuter en anglais, alors on reprend la conversation, on parle de tout et de rien, son voyage de 3 semaines dans le sud de la France, du temps de merde sur les deux Backyards auxquelles il a assisté en France. La conversation se finit par une invitation à venir visiter son jardin, à comprendre se qualifier pour les championnats du monde de Backyard qui se passe littéralement dans son grand jardin où il a eu l’idée de créer ce format en promenant son chien. Un jour peut-être…
Pour la suite de l’année, je me suis inscrit sur un sprint de 21 km en avril où je vais être obligé de courir trop vite pour avoir le temps de raconter des trucs sympas, s’en suivra un T24 aka triathlon de 24h en relai avec les copains : Louison, Clémence & Lucas où l’on aura le temps de prendre des notes et l’apéro entre les boucles pour vous raconter comment se passe une épreuve du genre.